dimanche 20 novembre 2016

Théâtre abstrait

Voilà une carte postale qui n'a pas peur de dire franchement sa colorisation :



Facile aussi de dire de quoi il s'agit, du moins la raison de programme puisque c'est écrit dessus : Théâtre Romain Rolland.
Nous sommes à Villejuif.



Pourtant, voici bien aussi une carte postale et surtout une architecture qui savent rester abstraites voire absconses ! En effet, comment ne pas être intrigué par une architecture si peu dévoilée par cette photographie mettant dans son cadre quelques pans de murs aveugles, un escalier montant dans une saillie, une fresque invisible derrière un arbuste. On ajoute une forme incertaine sur la façade, sculpture ou enseigne, et un lot de planches posées là et le décor est planté.
On aimera son champ coloré tenant de toutes les tonalités de bleus un peu salis par le noir et blanc de la photographie, il s'agit du procédé DIACOLOR.
L'abstraction est presque complète !



Les éditions P.I, on les connaît bien et sont une véritable source de cartes postales de la banlieue comme Lyna ou Raymon. Malheureusement, elles ne nomment pas leur photographe ni les architectes. Il m'aura fallu attendre de trouver (enfin !) un numéro de la revue Techniques et architecture de 1964 pour avoir la réponse. Il se trouve que les architectes de ce théâtre ambitieux pour son rôle dans le programme urbain sont, l'Atelier d'Urbanisme et d'Architecture J. Bailly, B. Mouzas, J.P. Bertrand. On trouve dans la revue, un article signé R.S, il s'agit du bien connu René Sarger qui explique la construction de la coque du toit. Il travailla avec Brillouin pour l'acoustique et Demangeat pour la scénographie. On remarque aussi que le photographe (inconnu) ayant travaillé pour l'article a aussi cadré l'entrée quasiment du même point de vue que le photographe de la carte postale. Sans doute que l'écriture très pure et dure de ce théâtre devait solliciter d'elle-même une photographie ainsi contrastée et ferme dans ses formes. On entend bien dans le texte et dans les images ce désir d'une architecture entièrement fondée sur son programme, dessinée depuis l'intérieur vers l'extérieur dont les formes et solutions spatiales répondent d'abord à leur rôle : une pureté désirée, presque, en fait, une éthique.
On notera enfin que, étrangement, ce théâtre a échappé à notre guide d'architecture contemporaine en France.

 








On peut, grâce à cette maquette, mieux saisir la courbe si particulière du toit et sa jonction avec le bâtiment, ci-dessous, René Sarger vous explique sa conception :
 

 

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