samedi 5 octobre 2013

Sannois, comme au Village



Une forme épaisse et assez vigoureuse.
Une volumétrie changeante, sculptée volontairement variée, tentant sans doute d'imiter la progression historique. Une habileté de la couleur qui vient souligner et perturber cette masse, rompre sans doute les lignes de sa construction pour varier aussi à l'œil une monotonie de la masse.
Aux derniers étages, le bordel étonnant de toits en pente, imitant là aussi les jeux possibles d'une ville fabriquée par le temps.



Visuellement, il semble que l'on ait voulu absolument rompre avec l'ennui d'une barre et fabriquer comme au Village, d'un coup, une poésie des formes et des couleurs variées nées d'habitude des collages des petites histoires individuelles.
Malgré la présence de beaucoup de balcons, de jeux de retraits, on s'étonne d'ouvertures tout de même assez peu généreuses.
Mais la réalité est là, la variété est effective et donne bien à cet ensemble nommé "Le Village" au Sannois (Val d'Oise) un dynamisme de rupture. On sent aussi une attention aux circulations piétonnières dont la très belle passerelle sculptée et massive joue d'un registre de porte de village qui résonne entre un pont-levis médiéval et un détail de la Grande Motte.



Mais tout cela tenait bien aussi par le travail de la couleur qui aujourd'hui a disparu, brisant sans attention, le contrat avec les architectes ayant tenté là une expérience délicate qui méritait mieux que ce blanc barbouillé partout et alourdissant de manière catastrophique ce travail pourtant attentionné. C'est, comme souvent en France, ce manque d'attention, cette fainéantise de l'entretien et du maintien des choix architecturaux qui dégradent les paysages urbains. Car, s'il ne s'agit pas de crier ici au génie constructif (et pour quoi faire d'ailleurs ?) on ne peut tout de même qu'être sensible à une certaine forme d'attention de cet ensemble, de son intégration à son tissu urbain par les deux architectes Messieurs Delaporte et Prévert. Pourquoi donc, lors du ravalement de cette façade, ne pas maintenir ce jeu de couleurs qui jouait un rôle essentiel et bien réussi dans cette construction ?
Est-ce si compliqué de maintenir et d'être attentif à ce travail ? Qui peut être suffisamment faible intellectuellement pour prendre la décision sans effort de barbouiller de blanc ce travail, cette pensée ?
Redonnons à ce morceau de ville du Sannois ses belles couleurs, sa variété. On y reconnaît aussi la polychromie des Linandes de Roland Simounet sans doute ici bien moins ambitieuse mais pas inutile.
Nous noterons enfin que cette carte postale Lyna est une photographie de Monsieur J. E. Pinet, avec qui nous espérons toujours avoir un jour la chance de parler.



En 1985, pour répondre à un jeu, le mot caméléon est noté au verso de cette carte postale représentant le Théâtre Cyrano de Bergerac de Sannois.
Mais ce qui m'intéresse ici c'est bien la frontalité franche de cette photographie qui découpe ainsi la façade de ce théâtre en zones sur un ciel bleu. Il faut dire que, sans doute, l'excellent Rolf Walter, grand photographe des éditions Lyna n'avait d'autre choix devant un monument solide et franc dont la fonction est bien invisible depuis ce point de vue. Une tour un peu verte à gauche doit cacher les escaliers, un grand rectangle de verre et de panneaux nous propose un brun chaud et froid en alternance, le trou noir des entrées offre un socle et le très inattendu petit rectangle de verre en bas à droite d'une vitrine est un contre-point habile à l'énorme fronton sur lequel se pose le nom du Théâtre. Toute cette plasticité est solidement fermée, presque sérieuse. On pourrait avec imagination y retrouver certains éléments d'aspect (et seulement !) avec Andrault et Parat. Sans doute qu'une époque se reconnaît à ces matériaux... On ne saura rien de ou des architectes...
Mais reste une image et une photographie forte par cette frontalité.
Frontalité massive dont j'aime à me repaître.






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